Thème 1 : Comprendre un modèle politique : la démocratie
Chapitre 1 : La démocratie, un concept et des modalités
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Le modèle athénien
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Athènes est une cité grecque parmi un millier d’autres et toutes sont formellement indépendantes. Elles possèdent chacune leurs institutions, leur propre gouvernement. Les modèles varient dans le temps et dans l’espace. Sparte, grande concurrente d’Athènes, n’a jamais été une démocratie mais une oligarchie. D'autres cités vivaient sous le des régimes tyrannique ou monarchique.
Évoquer la cité d’Athènes au Ve s. av. J.C. comme modèle de la démocratie est un lieu commun en histoire. A l’exception de l’Éloge funèbre de Périclès dans la Guerre du Péloponnèse de Thucydide, il n’existe aucun traité théorique de la démocratie athénienne rédigé par un contemporain. Ce modèle est donc une construction historique qui mérite d’être examiné. La démocratie athénienne est considérée comme le creuset de ce type régime politique qui place le citoyen, pourvus de droits politiques, sociaux et individuels, garantis par les lois, les nomoi, au centre de la gestion de la cité. Cette cité, la polis, est une d’abord une communauté d’hommes libres regroupés dans un territoire. L’avènement de la démocratie athénienne survient après les crises politiques du VIe av. J.-C où la cité connaît successivement la tyrannie puis l’oligarchie. Des réformes vont mettre en place la démocratie qui ne cesse d’évoluer et qui s’articule autour d’institutions chargées des affaires publiques.
L’étude des institutions politiques d’Athènes permet de comprendre ce qu’est la démocratie représentative et l’étude de ses limites nuance fortement la vision d’une démocratique idéale.
A) Le fonctionnement de la démocratie athénienne
Athènes a connu tous les régimes politiques : la monarchie, l’oligarchie (594-552), la tyrannie (552-508) puis la démocratie (508-322). Cette démocratie repose sur des institutions et un exercice du pouvoir résultant de réformes qui se sont imposées aux habitants de la cité.
La démocratie athénienne est le fruit d’une construction historique jalonnée par des réformes successives qui organisent l’exercice du pouvoir entre les citoyens.
Solon : archonte en 594 av. J.-C.
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Réformes sociales : Création de 4 classes censitaires (Pentacosiomédimnes, Hippeis ou chevaliers, Zeugites, thètes), Abolition de l’esclavage pour dette
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Réformes politiques : création de l’Héliée, de la Boulê et de l’Ecclésia. La magistrature et la Boulê sont réservées aux trois classes censitaires supérieures.
Clisthène 508-506 av. J.-C. :
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Répartition des citoyens en une centaine de dèmes, eux-mêmes regroupés par trois ou quatre dans des trittyes, elles-mêmes regroupées dans 10 tribus : La division repose sur des critères géographiques et non plus de richesse.
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- réorganisation des pouvoirs avec la prédominance de l’Assemblée, l’Ecclésia, et de la Boulè qui passe à 500 membres
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Tirage au sort aux fonctions politiques par tribu mais seules les deux premières classes censitaires peuvent accéder aux fonctions de la haute magistrature. Isonomie : partage égal des droits et non égalité des droits.
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Ostracisme : vote à 6000 voix à l’aide de jetons, ostrakon, d’une mesure d’éloignement pour 10 ans des personnes indésirables
Périclès (461 – 429 av. -C.) :
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Création d’une indemnité journalière pour les citoyens participant à la vie publique : le Misthos
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Restriction de la citoyenneté accordée descendant de père et de mère athénien en 451 av. J.-C.
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Suprématie de l’Ecclésia qui exerce les pleins pouvoirs.
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Le rôle des institutions
Les institutions athéniennes respectent le principe de la séparation des pouvoirs législatif (Boulê et Ecclésia), exécutif (les stratèges qui ont un rôle militaire) et judiciaire (Héliée). L’Ecclésia est l’Assemblée des citoyens. Elle représente le Démos. Elle vote les lois, la guerre et l’ostracisme. Elle élit les représentants du pouvoir législatif.
La Boulê prépare les projets de lois soumis à l’Ecclésia. L’Héliée rassemble les jurés répartis dans des tribunaux populaires.
L’organisation de la cité repose sur une division du Démos en 10 tribus, elles-mêmes composées de 3 trittyes (30 trittyes), qui elles-mêmes rassemblent des dèmes (de 100 à 140), c’est-à-dire des communes. Chaque tribu est composée d’une trittye de la côte, de la ville et de la plaine. Un citoyen appartient à un dème qui le distingue. Son nom est suivi de celui de son dème (démotique). Ainsi, chaque tribu est représentée dans les institutions.
Le temps politique de la cité est divisé en Prytanées, au nombre de 10. Une Prytanée correspond à 36 jours durant lesquels l’exercice de la souveraineté se fait sous la présidence d’un dixième de la cité soit d’une tribu. Ce temps politique est décalé du temps religieux.
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La place du citoyen
La citoyenneté est un privilège qui donne des droits. La citoyenneté s’obtient suite à l’éphébie (service militaire) et à un engagement à défendre et servir la cité. A partir de Périclès, en 451, la citoyenneté est déterminée par la naissance. Il faut avoir des parents athéniens pour avoir le privilège d’être citoyen.
Ces droits sont politiques. L’isocratie est l’égalité dans l’accès aux fonctions politiques de la cité. L’isonomie est l’égalité des citoyens devant la loi. Chaque citoyen peut voter les lois à l’Ecclésia qui se réunit 40 fois dans l’année. Tous les citoyens peuvent être tirés au sort pour exercer les fonctions de magistrats, de bouleutes ou de juges ; seuls les plus importants et les stratèges sont élus par l’Ecclésia. Les charges sont non cumulables et durent un an. Afin d’ouvrir ces fonctions au plus pauvres, Périclès instaure le misthos, une indemnité journalière.
Un citoyen peut cependant perdre ses droits, être frappé d’atimie voire d’ostracisme. Mais il peut aussi amorcer une procédure d'abrogation de lois ou de décret un an an après son vote appelée graphè paranomôm si cette disposition est préjudiciable aux intérêts de la cité. Le citoyen peut également procéder à une eisangélie qui consiste à dénoncer un citoyen portant atteinte aux intérêt d'Athènes. .
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Le débat démocratique
Le débat démocratique repose sur le principe de l’iségorie qui est l’égalité du temps de parole à l’Ecclésia, mesurée par une clepsydre. Chaque citoyen peut ainsi prendre la parole et affirmer son opinion. Cependant, la prise de parole devant un assemblée parfois colérique, violente n’est pas aisée. L’art oratoire, la rhétorique, est enseignée dans les écoles athéniennes, fréquentées par les enfants des familles les plus riches. Les procédés rhétoriques permettent de convaincre la foule et les débats politiques deviennent des joutes oratoires. Comme le souligne Platon, cette rhétorique porte le risque de la démagogie, pratique qui consiste à flatter l’auditoire.
Le théâtre est également un lieu politique. Les pièces d’Eschyle ou Euripide vantent les vertus de la cité athénienne. Aristophane, dans ses comédies, au contraire, ridiculisent les travers de la démocratie athéniennes et en expose les dangers.
Texte : Être citoyen par Aristote
" Le citoyen n’est pas citoyen du seul fait qu’il réside quelque part (le métèque et l’esclave ont, comme lui, le droit de résider). […] Le citoyen au sens strict, aucun caractère ne le définit mieux que la participation à l’exercice des pouvoirs de juge et de magistrat. […] Dès lors, nous posons le principe que sont citoyens ceux qui participent ainsi au pouvoir. Telle est donc à peu près la définition du citoyen qui s’adapterait le mieux à tous ceux qu’on appelle des citoyens. […] Or nous voyons que les constitutions diffèrent spécifiquement les unes des autres […]. Par conséquent, le citoyen, lui aussi, est nécessairement différent suivant chaque constitution. C’est pourquoi le citoyen dont nous avons parlé existe surtout dans une démocratie ; dans les autres régimes, on peut le trouver, mais pas nécessairement. Dans certains États, il n’y a pas de peuple [demos], ni de sessions régulières de l’Assemblée, mais seulement des réunions sur convocation, et les procès sont répartis entre certains juges ; ainsi à Sparte, les éphores se partagent entre eux les procès civils, les gérontes jugent les procès criminels […]. La nature du citoyen ressort ainsi clairement de ces considérations : quiconque a la possibilité de participer au pouvoir délibératif ou judiciaire, nous disons dès lors qu’il est citoyen de cette cité concernée […]."
Aristote, Les Politiques, III, 1, 1274b, IVe siècle av.J.-C., trad. J.Aubonnet, Éd.Les Belles Lettres, 2002.
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Trouvez la définition de géronte et d’éphore
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Justifiez la dernière phrase du texte à l’aide de vos connaissances et des documents 1 et 2 p. 47.





